
Emile STAHL est décédé le 18.02.2008 à l' âge de 87 ans
Articles de Presse
ALSACE-FOOT
DNA
|
Emile STAHL
Le dernier mécène
Emile Stahl est en matière de sport un
personnage hors du commun. Depuis des années, il veille sur l'AS PIERROTS
VAUBAN, meilleur club amateur de football en Alsace. Son aide matérielle et
financière n'a qu'un seul objectif : son plaisir...
Assis dans le bureau du groupe immobilier
qu'il a bâti de ses mains, il contemple son passé avec une certaine
satisfaction. Il sait que sa réussite a quelque chose de formidable. Mais s'il
ne la cache pas, il répugne à en parler. Aussi préfère-t-il amener la
discussion vers sa passion. Celle qui dirige toute sa vie, ou presque: le
football en général, et l'AS Pierrots Vauban en particulier. «Mon club»,
précise-t-il. Auquel il donne beaucoup.
Ce dernier le lui rend bien. «Que deviendra
le club le jour où Emile Stahl décidera de mettre un terme à sa collaboration»,
s'interrogent souvent certains dirigeants inquiets. La présence du «grand
patron » représente tellement pour eux, qu'ils ne peuvent, ne veulent, imaginer
une telle hypothèse. Le jour venu, il sera toujours temps d'y penser. De son
côté, «Monsieur Pierrots», comme ils le surnomment, ne s'inquiète pas. Il a
toute confiance dans l'avenir. «Le jour où j'arrêterai, explique-t-il, Vauban
poursuivra sa route comme par le passé. Le club est bien structuré, il a des
finances saines». «Au pire, admet-il, il évoluera en Division d'Honneur à la
place du CFA. Je crois sincèrement qu'alors, ce ne sera pas un mal».
Un apport social
Au fait, combien donne-t-il pour que les
«Pierrots», gardent leur place «au zénith de l'amateurisme»? «C'est
subséquent», répond-il, plein d'ambiguïtés. Et de préciser quand on insiste:
«Mon apport est social. L'argent vient ensuite». Ce n'est pas un ex-joueur
comme Hubert Hausser qui dira le contraire. Arrivé au club, il est embauché en
même temps dans l' entreprise comme employé. Aujourd'hui, il est passé de
l'autre côté de la barrière sociale en devenant l'associé dans une des sociétés
du groupe. Un exemple parmi d'autres. Plus de cent. « Mieux que l'argent, il
est désormais vital de procurer un emploi. J'ai la satisfaction de voir que
nombre de joueurs qui sont passés un jour par chez nous, ont réussi dans leur
vie professionnelle». Notamment des anciens pros du foot, ou des membres des
centres de formation n'ayant pu dépasser ce cap, qui le jour de leur arrivée
aux «Pierrots» ne disposaient d'aucun bagage professionnel et ignoraient
totalement le monde du travail. «Les footballeurs ne sont pas formés pour
quitter le football. Or il est primordial .de les insérer dans la vie sociale,
de leur trouver une reconversion acceptable. Heureusement, j'ai l'avantage de
connaître du monde, d'avoir des relations, et dans ce cas, cela peut aider.»
Joueur à Strasbourg, à Nice dans la formation des frères Vallée, mais également
en «Russie» pendant la guerre alors qu'il avait été condamné à mort par les
Allemands, il a ainsi trouvé le moyen de continuer à vivre sa passion. Avec
comme seul profit la possibilité d'être au coeur de moments inoubliables.
«C'est grâce à cette équipe, confie-t-il, que j'ai connu mes plus belles joies.
Par exemple en juin 1969, lorsque nous avons arraché notre premier titre de
champion de France amateurs. C'était face à Fontainebleau. Grâce à Paco Matéo,
nous avions gagné 3-2 alors que nous perdions 2-0 et que tous les observateurs
nous plaignaient. L'équipe a réalisé une seconde période irréelle pour
remporter le trophée. C'était une véritable équipe de copains comme il n'en
subsiste plus beaucoup, avec une foi capable de soulever des montagnes».
Une famille
D'autres trophées comme un second titre
l'année suivante devant Montélimar (1-0), et des difficultés, sont ensuite
venus émailler la vie des «Pierrots». Cependant, il est toujours resté fidèle
au poste. «Un instant, j'ai envisagé d'abandonner. J'avais le sentiment d'en
avoir assez fait. Seulement pris au jeu, j'ai décidé de repousser de quelques
années ce moment». Mais il viendra et beaucoup plus tôt qu'on peut le croire
car petit à petit un sentiment de ras le bol apparaît. «L'esprit amateur n'est
plus ce qu'il était et cela me déçoit. Comme me découragent, voire me
dégoûtent, les spectateurs qui viennent à nos matches. Il est navrant de devoir
évoluer devant parfois moins d'une centaine de supporters».
Suffisant pour lui faire rendre son tablier?
Pas si sûr. La passion a des raisons, que la raison ignore. Et puis dans sa
carrière de footballeur, il a certainement connu des moments bien plus
difficiles. Alors ? Il n'est pas homme à ne pas relever les défis. Si tel avait
été le cas, il aurait depuis longtemps déjà tout mis au rencard. Quand on aime,
on ne compte pas. Et dire qu'il est rentré aux Pierrots tout à fait par hasard.
Raccolé par Charles Lausecker. «Mon père spirituel. C'est grâce à lui que j'ai
découvert ma seconde famille. Que j'en suis devenu le capitaine, puis que j'y
ai pris des responsabilités. Enfin que j'ai pu y vivre une extraordinaire
aventure». C'était en... Chut. Secret.
Rémy Zaka
|